Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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IV

Cependant le roi, ou plutôt son entourage, n'avait pas perdu l'espoir de regagner le terrain perdu. Cette fois il n’y a pas de doute, c'était la force que l’on comptait employer et la dissolution de l’Assemblée nationale que l’on avait comme objectif.

Voici comment Rivarol présente l'action du gouvernement :

Le gouvernement alarmé de toutes les atteintes que l'on portait à l'autorité royale, soit à Paris, soit dans les environs ; voyant d’ailleurs que l'agitation des esprits allait toujours croissant et qu’une population aussi monstrueuse que celle de Paris interprétait mal l'énergie de l’Assemblée nationale et s’autorisait en même temps de la défection d’une grande partie des gardes françaises, le gouvernement, dis-je, crut devoir arrêter dans leur germe les affreux désordres qui allaient résulter d'une telle disposition. Il fit approcher assez de régiments d'infanterie et de cavalerie pour en former un camp aux portes de la capitale. On plaça de l'artillerie sur toutes les avenues de Versailles et des patrouilles nombreuses et continuelles mirent bientôt le séjour du roi hors d’insulte.. Rien ne peut égaler la terreur qui s’empara de l'esprit de tous les députés à la vue des troupes et des canons. Ils inondèrent la

che et les provinces de lettres effrayantes ; on ne parla bientôt plus que des attentats de l’autorité contre l'Assemblée nationale... On disait que Paris allait être assiégé el l'on comptait déjà les canons et les bombes qui lui élaient réservés, tellement que l’effroi, sincère chez les uns, simulé chez les autres, gagna bientôt la capitale et les provinces. Ainsi, pendant que le roi rassemblait des soldats et multipliait les secours, l'Assemblée assemblait les suffrages et multipliait les craintes. Pour le dire en un mot, le roi et l'Assemblée se disputaient l'armée!. »

Morris surveillait la marche rapide des événements et de son œil perspicace il calculait les forces en présence. Il est aisé de

1. Journal politique national, n° 8 : OEuvres choisies, 1, I, p. 33-35.