Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

LES ÉTATS GÉNÉRAUX. L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 119

voir qu'à ce moment il était avec l’Assemblée ; car il voulait la liberté pour la France et il sentait bien qu'un coup d'Etat, dispersant les députés, c’eût été la monarchie absolue rétablie et consolidée.

Dans la lettre à Carmichael plus haut citée, il annonce nettement la partie qui se joue: « Les partisans de l’ancien régime sont parvenus à avoir un large corps de troupes rase semblé dans ce voisinage ; mais, si mes conjectures sont Justes, ces troupes seront bientôt dispersées. L'assemblée nationale a déjà marqué sa désapprobation ; mais la chose ne s'arrêtera pas là et tôt ou tard le roi doit les renvoyer. Même je suis porté à croire que cela sera cause que le royaume sera débarrassé des troupes étrangères : car, ne pouvant compter sur les régiments français, ils ont choïsi principalement les étrangers. Le but probable de ceux qui sont au fond de l’affaire est de surprendre un ordre de Sa Majesté, grâce à ses craintes qui sont maintenant continuellement excitées, de sorte qu'il est constamment le jouet d’appréhensions. Mais c’est une partie plus difficile et plus dangereuse qu'ils ne se l’imaginent. L'Assemblée a décidé que tous les impôts cesseraient lorsqu'elle se séparerait, excepté ceux qu’elle continuerait à imposer. Cela lui assure une existence et une durée aussi longues qu'il lui plaira de prendre et, si elle est dispersée, la France cerlainement refusera de payer. Une armée ne pourra jamais briser une entente générale à cet effet !. » Morris, on le voit, apprécie à sa juste valeur la précaution puissante que le génie de Mirabeau avait inspirée à l’Assemblée. Le coup était paré d'avance.

Le'8 juillet r789 Morris se promène aux Champs-Elysées : « Je rencontre M. Appleton et M. Jefferson qui me content les nouvelles de Versailles. Il ÿ aura samedi soir 25 000 hommes dans et autour de Paris. Quelques-uns parlent d'une séance royale pour lundi, mais cela n’est pas fondé. Je vais chez M. Le Coulteux. Ilsont de tristes nouvelles : que les États généraux vont être dissous, la banqueroute décrétée, la paye des troupes diminuée, etc. ?. » C'élaient là de fausses nouvelles,

1. T. E, p. 116— 2. A NprEt)

qe.