Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

126 GOUVERNEUR MORRIS

jourd’hui (4 juin 1 789) .- . M. Jefferson, avec qui je fais une promenade en voiture, me présente requête, de la part de M. Houdon, pour que je veuille bien poser demain, pour le buste de Washington !. » Il y consentit quoique cette substitution lui parüt étrange. Houdon pensait sans doute que n'ayant pas l’original, il était bon, comme document, d’avoir l'image d’un américain, d'un autre héros de la Révolution américaine.

D'ailleurs, si Morris ne paraît pas avoir eu le sens de la peinture et des arts plastiques, comme le montre son projet de tableau sur la prise de la Bastille, il avait profondément celui de la musique. Entre autres preuves, je relève cette note dans son Journal. « Après diner (22 novembre 1790), à l'Opéra, je m'assieds derrière mon inconstante amie Mme de Flahaut et, comme heureusement la musique me rend toujours grave, je me maintiens dans le style sentimental?. » Un autre anglo-saxon, le plus grand de tous, a exprimé la même idée dans un vers admirable du Marchand de Venise :

« l am never merry when [ hear sweet music. »

La note de Morris est-elle une réminiscence inconsciente, ou bien a-t-il eu l'honneur de se rencontrer avec Shakespeare ?

Le 17 juillet il assiste avec Mme de Flahaut à l'entrée du roi dans Paris: « Ce matin mon cocher me dit qu'il y a des placards défendant aux voitures de circuler, le roi devant être en ville entre dix et onze... Je me procure, avec l'aide de Mme de Flahaut, une fenêtre dans la rue Saint-Honoré par laquelle le cortège doit passer. En me glissant à travers la foule, on prend dans ma poche un mouchoir, qui pour moi vaut bien plus que le voleur ne pourra en retirer et je paierais volontiers son habileté, si je pouvais le retrouver. Nous attendons de onze heures à quatre. Il semble que Sa Majesté a été escortée par la milice de Versailles jusqu'au Point-du-Jour.

AD 07 ALP: 508; 3. « Je ne suis jamuis gai quand j'entends de douce musique, » The merchant of Vencice. Act. N, scène r.