Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

it LES ÉTATS GÉNÉRAUX. L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 143

tel droit positif aux citoyens, par exemple la liberté de la presse, ou le ] ugement par le jury. D'autre part, les devoirs religieux et la nécessité du culte ÿ sont parfois rappelés. Ces déclarations étaient alors bien connues en France, on y a fait allusion plus d’une fois à l'Assemblée nationale, et même quelques-uns, à tort selon moi, soutiennent qu'elles sont la source de notre déclaration de 1789. En réalité, c'est là, de part el d'autre, un produit de la philosophie du XVI siècle : un résumé des thèses sur le droit naturel, qui constituaient alors la principale philosophie politique, si bien que la plupart des articles de notre déclaration trouvent leur meilleur commentaire et leur éclaircissement le plus pénétrant dans les écrits de Locke. Tous les publicistes de cette école voulaient une déclaration des droits, et, pour d’autres raisons, les économistes en voulaient une aussi ?. C'était en quelque sorte un lieu commun de la science politique au temps de Louis XVI? et cela se voit bien au nombre de projets de déclarations des droits qui furent déposés à l’Assemblé constituante.

Morris n’en est pas moins hostile à notre Déclaration. Il y a là une méthode absolument opposée à la sienne. C'est l’abstraction au lieu de la réalité vivante; la fausse supposition que les hommes sont tous pareils et raisonnables. Sur ce point il exagère certainement, car les hommes auxquels songeaient les Constituants c’étaient leurs contemporains, ces hommes cultivés du xvm‘ siècle, qu’une éducation semblable et un même mouvement d’esprits avaient faits à peu près pareils. Comme l'avait dit Rousseau : «€ Il n’y a plus aujourd'hui de Français, d’Allemands, d'Espagnols, d’Anglais même, quoi

1. Constilulions des lreize États-Unis de l'Amérique à Philadelphie (et se irouyve à Paris chez...) 1783. — Déclaration des droits de l'homme et du ciloyer, comparée avec les lois des peuples anciens et modernes et principalement avec les déclarations des États-Unis de l'Amérique, 2° édit. Paris, l'an troisième de la liberté. '

2, Mercier de La Rivière et de Le Trosne insistent sur ce point.

3. Un royahste pur, J.-B. Morean, dans son Discours sur la justice (Versailles x785), composé pour l'éducation de Louis XVI, traite (p.205) « des droits que l’homme tient de la nature ct que le gouvernement est destiné à

maintenir et à protéger ».