Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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u'un élément de trouble et ne pouvaient engendrer la liberté véritable ; que cette union, dans un faux équilibre, du pouvoir judiciaire et d'un pouvoir quasi législatif, était une création malvenue de l'histoire. C’est aussi ce que pensait l'abbé Morellet lorsqu'il écrivait à lord Shelburne le 28 novembre 1787: au moment où l'opposition des parlements reprenait : « Je n'oserois encore vous assurer qu'il résultera pour nous de l’état actuel une véritable représentation nationale, substituée à nos parlements qui ont toujours bien mal rempli cette fonction ‘. » Dès le 3 juillet 1789 Morris écrit : « Cantaleu, qui est ici, est tout bourré de politique et dit que Je Suis fréquemment cité par les aristocrates comme étant de leur

arti. Cela me conduit à expliquer mes opinions avec lesquelles il s'accorde et il en paraît enchanté. Le point de conciliation est l'abolition des parlements, que je crois nécessaire à l'établissement de la liberté, de la juslice et de l’ordre ?. » Le 3 novembre suivant il note : « Je vais au club et apprends que l’Assemblée a aujourd’hui suspendu les parlements. C'est un meilleur coup porté à la tyrannie qu'aucun de ceux qu'ils aient frappés jusqu'ici; mais il va occasionner bien de la fermentation parmi les nombreux personnages influents, dont ils sont composés *. » Sur ce dernier point Morris se trompait. Ce colosse aux pieds d'argile tomba sans résistance ; les parlements disparurent, engloutis par cette révolution dont ils avaient été les premiers promoteurs. Cependant ils paraissaient si bien être l’un des traits essentiels de l’ancien régime que parmi les émigrés qui préparaient une Restauration, beaucoup se proposaient de rétablir ces augustes cours avec leurs anciens droits. Au mois de juillet 1795, Morris, alors en Angleterre et abouché avec les représentants de Louis X VIIT, trouvait cette idée chez le duc d'Harcourt et la combattait : « Diné chez M. de Ciricello, le ministre napolitain : le duc d'Harcourt, qui est là, me parle d'abord du duc d'Orléans, puis, d’une façon générale, des affaires de France. Il a fort en tête de rétablir les parlements. Je recommande de la part du nouveau roi des déclarations générales telles qu'elles ne

LES ÉTATS GÉNÉRAUX. L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 1:53

1. Op. eit., p. 261.— 2. T. I, p. rr2. — 3 per