Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

dl

LES ÉTATS GÉNÉRAUX. L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 175

sans volonté ferme, cherchant les moyens termes et se van-

tant d'estimer dans les hommes l'honnêteté plus que le talent.

On ne peut point dire que ce fut spontanément et par le: seul amour du bien public que Morris entreprit cette tâche difficile. L'idée vint de son amie Mme de Flahaut, et elle n'était pas désintéressée. Non seulement, le principal bénéficiaire devait être Talleyrand, mais elle-même espérait en retirer un profit pécuniaire. C’est le 4 octobre 1789 : « Je dine au Louvre, écrit Morris, avec Mme de Flahaut et l’évêque d'Autun. À diner elle se trouve mal. Nous causons des. affaires publiques et elle nous dit que s’il est ministre, il faut que nous fassions un million pour elle !. »

Le 8 octobre, les plans sont arrêtés chez Mme de Flahaut : « Je vais au Louvre; Capellis est là. Madame prend à part l'évèque et moi ce qui ne surprend pas peu Capellis. Nous discutons à fond la composition du ministère. Se débarrasser de Necker est la condition sine qua non de l’évêque, qui veut sa place et je suis du même avis. Il me donne en ce qui concerne La Fayette toutes les assurances que je puis désirer. Après avoir arrangé le nouveau ministère, nous passons à la question des finances ?. »

La veille il a déjà fait à La Fay elte la première ouverture et immédiatement il a vu surgir le nom de Mirabeau : « Je prends quelques minutes pour ee à La Fayette qu'un chansement de ministère paraît nécessaire. Il a déjà parlé à Mirabeau ; je le regrette. Il songe à prendre un ministre dans

1. T. I, p. 177. I faut constater que déjà auparavant Morris avait songé à l'entrée possible de Talleyrand dans l’administration. Le 7août 1789, voici ce qu'il écrit sur son Journal (t. 1, p. 146); il est alors en Angleterre et il s'agit du remaniement partiel du ministère français qui eut liew à cette époque: « Le marquis de la Luzerne m'annonce la réorganisation de leur ministère ; M. de la Tour-du-Pin, ministre de la Guerre ; l'archevêque de Bordeaux, garde des sceaux, que Malesherbes a refusés. Je regrette ce refus. Je dis au marquis que je croyais qu'on songeait à l'évêque d’Autun. Il me dit qu’il n’a pas la tête faite pour ces fonctions. J'en conclus qu'il a plutôt des idées de visionnaire, et peut-être l'est:il ; car c’est la mésaventure ordinaire des honimes de génie, qui ne sont pas suffisamment mélés aux affaires du monde, »

2 NEMINpArSS