Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

LES ÉTATS GÉNÉRAUX. L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 177

La Fayette lui-même. Morris veut bien se servir de l’homme populaire dont l'autorité morale est alors immense : lui seul peut faire accepter la combinaison ; mais il ne voudrait pas l'avoir dans le ministère, car il a peu de confiance dans ses idées et moins encore dans sa volonté.

Le 11 il reprend l'affaire: « Ce matin, fidèle au rendezvous, je vais chez La Fayette. 11 me fait attendre très longtemps. Je m'aperçois qu'il évite d'arriver à aucune.conclusion quant à un nouyeau ministère ; je lui demande donc négligemment s'il a réfléchi au sujet de notre dernière conversation. Là-dessus nous partons. Je lui rappelle la situation présente de la France et la nécessité de réunir des hommes de talent qui aient des principes favorables à la liberté ; que sans les talents l’occasion qui s'offre de rétablir le pouvoir exécutif sera perdue ; que, sans les principes, lorsque l'autorité sera reconquise, on en abusera : que lui ne peut pas, cela est impossible, agir à la fois comme ministre et comme soldat bien moins encore comme ministre de chaque département ; qu'il doit avoir des collaborateurs en qui il ait confiance ; que quant aux objections qu'il a faites à raison de la moralité de certaines personnes, il doit songer que l'on n'entre pas dans un ministère comme si c’élait le chemin direct pour aller au ciel ; que les hommes y sont poussés par l'ambition ou par la cupidité et que, par suite, le seul moyen de s'assurer de leur vertu est de faire qu'il soit de leur intérêt d'agir droitement!. » La Fayette propose alors des noms : Malesherbes, comme garde des sceaux ; La Rochefoucault, comme ministre de Paris. Enfin reparaîit Mirabeau : « Il déclare de nouveau qu'il veut avoir Mirabeau, à quoi je réplique qu’un homme si dissolu déshonorera tout gouvernement et l’on ne peut pas avoir confiance en un homme qui a si peu de principes. Je ne reviens pas. comme je le pourrais, sur le sujet de la moralité. Je:connais l’homme à qui je parle et, par suite, j'apprécie ses raisons. Il est très désireux d’être débarraësé de moi et je prends congé. Je suis vexé de voir que, par petitesse, les petits vont être placés là où les grands seuls peuvent s'asseoir. Il garde Necker,

1, (ET, p.r82,