Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

; LES ÉTATS GÉNÉRAUX, L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 1q1 çomme dit Morris à cette époque. Quelque séparés qu’ils fussent, ils avaient fait ensemble la Constitution. La disparition de Mirabeau, le vide immense qu'il laissait après lui,

semble les avoir fait réfléchir, douter d'eux-mêmes et sentir le besoin de se rapprocher les uns des autres. Peut-être les plus hardis d’entre eux inclinaient-ils, non seulement à des concessions en faveur de leurs adversaires, mais aussi en faveur de la royauté, disposés à augmenter la portion congrue de pouvoir à laquelle ils l'avaient réduite. 11 pouvait en résulter un rapprochement, peut-être mème une réconciliation entre les chels de la majorité et la Couronne : le gouvernement pouvait, tout au moins, essayer d'utiliser ces éléments nouveaux. Par là s'offrait une occasion de négociations et de marchandages que Montmorin saisit en effet. Morris y mel aussi la main, surtout celle de Brémond et nous allons voir Mme de Flahaut rentrer en scène.

C'est le 20 avril 1791 que Morris signale ces faits : « Je rentre chez moi et lis jusqu'à ce que MM. Brémond et Jaubert me rendent visite. Les Jacobins négocient une alliance avec les Quatre-vingt-neuf. L'objet.est d'empêcher qu’un décret rende les membres actuels inéligibles à la prochaine Assemblée !. » Le lendemain il rapporte à Montmorin ce qu'il a appris, et la réponse de celui-ci paraît montrer qu'il est déjà engagé dans l'affaire : « Je lui communique la cause de la coalilion projetée entre les Quatre-vingt-neuf et les Jacobins. Il me dit que, s’il l'avait voulu, il aurait fait passer depuis longtemps le décret d'exclusion. Mais il craignait le décret des quatre ans, qui a été adopté néanmoins?. Je lui

1, T. Ï, po7: s

2. Le décret des quaire ans dans le Journal, c'est ordinairement celui de novembre 1789, d’après lequel aucun membre de l’Assemblée ne pouvait être appelé au Ministère pendant toute la durée de ses fonctions et mème deux ans après leur expiration. Pour l'avenir cela faisait au moins quatre ans, la durée de la législature étant de deux années. Mais on peut douter qu'ici il s'agisse de ce décret voté depuis dix-huit mois. Certains membres de l'assemblée voulaient d'autre part « que les membres d’une législature quelconque ne fussent rééligibles qu'après un intervalle de quatre années ». Séance du 16 mai 17gr, discours de Prugnon, Réimpression de l’ancien Moniteur, t. VIII, p. 4r7. L