Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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qu'il assignait au lendemain à minuit la première assemblée de ce conseil ‘. »

La mémoire de Malouet l’a trompé sur un point capital. Le fait en queslion ne se passa point sous le ministère girondin, qui fut constitué au mois de mars 1792, mais bien au mois d'octobre 1791. Sur ce point le Journal de Morris ne laisse aucun doute. Le 18 octobre 1791 « Montmorin me dit qu'à l'heure où nous parlons Moustier est en conversation avec le roi et la reine et il est très blessé de ne pas être de la partie. Il dit qu'il a proposé deux choses : l’une, d’avoir un Conseil composé de personnes dévouées aux intérêts du roi, qui suivraient rigoureusement la Constitution, mais en vue de la détruire, et l’autre de laisser le ministère comme il est, en ne changeant que lui (Montmorin) et d’avoir un Conseil privé qui comprendrait lui, M. de Moustier, Malouet et l'abbé de Montesquiou ; ou, si celui-ci, en considération de son patron, qui est Monsieur, refusait, alors l'archevèque d'Aix; qu'ils ne feront rien; qu'il trouve ses mesures dérangées et ne sait pas sur quoi compter ; qu'il suppose que cela vient du comte Mercy d’Argenteau, qui donne à la reine des conseils bien calculés pour servir les intérêts de l'Autriche?. » Morris naturellement n'approuve pas. Mais Montmorin revient à la charge le 22 octobre : « Montmorin m'a répété ce matin ce qu'il m'avait déjà déclaré une fois, à savoir qu'il considère comme absolument indispensable que la Reine soit présente à la discussion des affaires du Cabinet et qué dans ce but il devrait y avoir un Conseil privé ou Malouet serait admis. Je n’en vois pas l'utilité et je n'en conçois pas la raison. » C'est à cette époque, la suite du passage le dit, que Morris songe au ministère Moustier — Bertrand de Mollevillé — Bougaimrville, dont

1. Mémoires, t. IL, p: 204: — 32. Æ. I, p. 465 ; cf, ci-dessus, p. 82. :

3. T. I, p. 470. Dans les lettres de Rivarol publiées en 1820 (Conseils donnés à Louis XVI en 1791) la création de ce conseil privé est recommandée, p- 45: « Pour obvier aux inconvénients qui naissent de la nature du ministère actuel, il est, je pense, très urgent que S. M. se compose un conseil secret et privé. » La lettre est datée du 22 septembre 1791; elle est, dans tous les cas, écrite peu de temps après l'acceptation de la Constitution par le roï, p. 44.