Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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van!. Ce nouveau changement de front parut presque un coup d'État. L'Assemblée, ant du droit que lui donnait la loi des 27 avril, 25 mai 1791, déclara queles ministres révoqués emportaient la confiance de la nation et envoya aux 83 départements la lettre que Roland avait adressée au roi!.

À partir de ce moment les ministères qui se font et se défont, et sur lesquels Morris donne d’assez nombreux détails, n’ont plus d'importance : c’est l’'émeute qui entre en scène, le 20 juin et le 10 août. Mais avant l’acte royal du 12 juin qui ouvrit la crise finale, il y eut sûrement une autre entreprise où Dumouriez joua le principal rôle. Malouet raconte : « Je sais qu'à cette époque, au mois de mai 1792. le général Dumouriez, anciennement lié avec M. de La Porte et qui disait ne s'être fait révolutionnaire que pour servir la cause royale, eut une grande explication avec S. M. et que ses moyens se rapportaient entièrement à ceux que M.de Montmorm et moi avions proposés ; mais lorsqu'il conseilla au roi, comme condition préalable, d'abandonner toute opposition aux décrets sur les prêtres, d’abonder totalement dans le sens des Jacobins, d'adopter leur esprit, leur langage, pour mieux les tromper, cette politique machiavélique déplut à Louis XVI?. » D'autre part, je lis dans le Journal : « 1°° juin 1792. Brémond et Monciel viennent ce matin et me disent que Dumouriez, pour montrer sa sincérité, a lu au Conseil un plan pour renverser les Jacobins, mais il a été mis en minorité. Il à depuis promis de mettre de côté Clavière et Servan. » Le 3 juin il dine c -hez Dumouriez : « Il croit qu'à présent la Constitution ne court aucun danger, qu'elle triomphera de tous les obstacles et doit s’amender. Je pense qu'il ne peut pas croire la moitié de ce qu'il dit. » Dans une lettre du même mois il rend compte à Jefferson de cette soirée : « Conformément à vos instructions, j'ai saisi cette occasion de signaler l'acte désastreux de l’ancienne Assemblée ?, à la fois à M. Dumouriez et à M. Boncarère, son secrétaire confidentiel. Ce dernier m'a dit que son

1. Réimpression de l'Ancien Moniteur, t. XII, p. 657. 2. Mémoires, t. IL, p. 207. 3. C'est sans doute de la loi sur le tabac, qu'il s'agit.