Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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que la nouvelle Constitution sera facilement acceptée dans le désarroi universel. Le 25 mars 1792, chez Mme de La Luzerne: « La société, toute composée d’aristocrates, dit que dans la nation française, il n'y a pas une personne sur cent qui soit attachée au présent gouvernement. Quære : il est certain que beaucoup de prêtres, qui avaient prêté le serment, se rétractent et que la religion parait embarquée dans la querelle, de sorte que si, en même temps, l'artillerie de l’ennemi et les foudres du Vatican sont dirigées contre eux, beaucoup licheront pied ; si, en outre, une bonne Constitution est proposée, cela peut produire un grand et heureux changement, ce que Dieu veuille ! ! » Le r°* août on lit, dans une lettre à Jefferson : « Dans le présent état de choses, il parait évident que, si le roi n'est pas perdu, il sera bientôt absolu. Les premiers auteurs de la Révolution ne voient pas d’autre moyen de rétablir les affaires de leur pays sur un pied tolérable, et, par suite, ils apporteront à S. M. un adhésion fondée sur l'abolition de la Constitution par l’Assemblée et la ruine des Jacobins, leurs maîtres ?. » C’est aussi ce que pensait Mallet du Pan, en ce qui concerne les anciens modérés: partisans d’une second Chambre où Chambre des Pairs : « Quoique persévérans dans leurs opinions, presque toujours aussi mal entendues que mal jugées, mais aujourd'hui modifiées par une funeste expérience, qui leur manquait, ils sont tous réunis à la nécessité de rétablir l'autorité royale, dans la force et la dignité compatibles avec le degré de liberté publique que peut comporter le gouvernement d’un grand Empire. Ils sont unanimes à demander le clergé, la religion nationale, la noblesse, les grands tribunaux. On n’a à craindre de leur part aucune espèce d'opposilion ; parce qu’il n’en est pas un qui ne préféràt mème la monarchie absolue aux lois mon: strueuses du moment et à l'autorité des hommes qui les ont inslituées ?. »

Morris, nous l’avons dit, a été certainement mêlé à la première tentative dont parle Malouet et même nous pouvons, grâce à lui, en préciser la date. Il fournit sur ce point des

1. ©. L, p. 524, — 2, T. I, p. 566. — 3. Mémoires, &. I, P. 435.