Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

GOUVERNEUR MORRIS

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lui, pour des raisons que j'établirai !. Les partis monarchique et aristocratique désirent sa mort dans la croyance qu'une

areille catastrophe révolterait les sentiments de la nation, réveillerait son attachement héréditaire et détournerait dans les canaux du loyalisme le flot impétueux de lopinion. Ainsi il est devenu un commun objet de haine pour tous les partis, parce qu'il n'a jamais été le patron décidé d'aucun. S'il est sauvé, cela sera par la justice de sa cause, qui aura quelque peu d'effet, et par la pitié qui est généralement ressentie (bien que personne n'ose s'exprimer ouvertement) pour le traitement très dur qu'il a souffert?. »

Le 6 janvier 1793 il écrit à Wasington: « Lesort du roi sera décidé le lundi 14. Ce malheureux homme, causant avec un de ses conseils de son propre destin, a résumé avec calme les motifs de toute sorte et a conclu qu'il ÿ aurait dans la Convention une majorité pour renvoyer la décision de son affaire au peuple et qu'en conséquence il serait massacré. Je pense qu'il doit mourir ou régner. » Le 25 il raconte à Jefferson l'exécution du roi, en donnant les détails connus : « Sur l’échafaud il essaya de parler, mais l'officier qui commandait, Santerre, ordonna aux tambours de battre. Le roi fit deux elforts inutiles, avec le même succès. Les exécuteurs le courbèrent et telle était leur hâte qu'ils firent tomber le couteau avant que le cou fût bien placé et qu'il fut déchiqueté F5 Morris croyait d’ailleurs, dans une certaine mesure, à l'effet que produirait l'exécution sur le peuple : « On avait eu le plus grand soin de prévenir un concours de population. Cela prouve la conviction que la majorité n'était pas favorable à cette sévère mesure. En fait, la grande masse du peuple pleurait le sort de leur malheureux prince. J’ai vu du chagrin, comme pour la mort prématurée d’un parent aimé. Tout porte un air de solennité qui est saisissant. Sur le lieu même un gentilhomme m'a dit que l'exécution du roi serait un signal auquel l'armée des Flandres se débanderait. Je ne crois

1. Le motif était, selon Morris, la crainte de voir la monarchie maintenue

avec une régence ; voyez ci-dessus, p. 285.

2, EL Il prorre— 3. T. IL, p. 27. — 4. T, IT, p.357.