Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

LA RÉPUBLIQUE; LA CONVENTION 299

la populace (chose grâce à Dieu inconnue en Amérique) flattée de l’idée qu'elle était omnipotente, et nécessairement désappointée quant aux perspectives dorées qu'on avait originairement présentées à ses yeux, ne connaissait aucune contrainte si ce n’est celle qui lui est imposée par des magistrats de son choix. Il en résulta inévitablement que l'exécutif devait être au pouvoir du législatif et ce dermier à la merci des hommes qui exerceraient une influence sur la populace (mob) !» . Le 21 décembre 1792, ül parle encore des Jacobins « ayant derrière eux la poules “parisienne ». Et plus loin (c'est à Jafferson qu'il écrit) : « Je vous dirai à l'oreille qu’en dépit de ces clameurs, ils éviteront une guerre avec l’Angleterre, si le peuple le leur permet. Mais * vérité est que la populace de Paris exerce une grande influence sur les conseils du gouvernement ?.

Mallet du Pan a Fo les mêmes traitsetila fait, en quelque sorte, lathéoriede ce gouvernement populaire. Iv ientd’uneexasération, d’une déviation du principe de la souveraineté nationale. On admet que non seulement le peuple est la source de tous les pouvoirs, mais qu'il peut exercer lui-même la souveraineté. [l y a plus, malgré l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, une simple section du peuple, un groupe de citoyens, surtaut le peuple de la capitale, se présente volontiers comme si elle était la nation souveraine et agit en conformité. Certaines conséquences de ces idées Bose. sont bien connues. C’est le vote populaire appelé à ratifier les constitutions successives à partir de 1793. C'est l’essai de gouvernement direct en matière législative que tentèrent en 1793 la Constitution girondine et la Constitution jacobine du 24 juin. C'est le contrôle exercé par le peuple des tribunes sur les députés de 1789 à à 1799- Ce n’était pas là simplement un abus que l’on n'osait réprimer ; c'était comme un droit constitutionnel. Le 4 octobre 1791, un député s’écriait s'adressant aux tribunes : « Peuple français, citoyens de Paris, F rançais généreux, et vous, citoyennes vertueuses et

savantes, qui apportez dans le sanctuaire des lois la plus douce

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1. T. I, p. Goo. — 2. T. Il, p. 13.