Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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être utiles, je n'hésiterais pas à les rendre : mais j'espère que ces circonstances ne se présenteront point !. »

Il n’en resta pas moins profondément honoré, estimé el consulté par les hommes politiques. On a vu comment fut demandé son avis sur l'acquisition de la Louisiane ?. L’autorité qui lui était reconnue, le respect dont il était entouré se marquaient en particulier en ce qu'il était, comme l’orateur en titre, qui prononçait l’oraison funèbre des héros de la Révolution américaine, à mesure qu'un à un ils descendaient au tombeau, depuis son retour au pays. Comme il avait prononcé celle de Washington le 3 décembre 1800, il prononce le 14 juillet 1804 celle de Hamilton, misérablement tué en duel *, et le 30 mai 1802 celle de Georges Clinton.

Dès lors, sa vie devait se passer tranquille dans son cher Morrisania, sauf les voyages assez fréquents qu'il faisait à New-York et dans diverses parties des États-Unis. C'était la vie du sage et, semble-t-il, dans un admirable milieu. Luimême l’a décrit plusieurs fois dans ses lettres. « Je suis, écrivait-il, à la princesse de Tour et Taxis, entouré de maçons et de charpentiers, dont depuis deux ans je suis l’esclave. J’espère en être bientôt quitte, et je jouis en attendant de la plus -belle saison que j'aie vue de ma vie. Vous en jugerez par la circonstance que nous avons cueilli hier (29 octobre 18or)des petits pois en plein vent. Ma maisonnette s'élève sur les bords d’un bras de mer, six fois plus grand que votre fleuve, où il passe tous les jours quelques douzaines de vaisseaux de toute grandeur. Cette vue anime beaucoup un paysage d’ailleurs riant. Enfin, pour tout dire en un mot, c’est le sol natal 6. » Le 13 avril 1803 il écrit à John Dickenson : « Absorbé dans mes occupations rurales, j'oublie, aussi vite que je le puis. qu'il y a dans le monde rien de pareil à la politique — plus d'une semaine s'est écoulée sans que j'aie entendu parler de la ville ou lu un journal. Menant ainsi la vie d’un ermite, il n'est impossible de rien écrire qui vaille la peine d’être lu à

* yous qui vivez dans le monde. Étant de plus célibataire, je

re TI p 436. — 2. Ci-dessus, p. 352. — 3. T. II, p. 380. Ds IE, pe 467. — 5. 7. IT, ps hr, — 6. TV. Il, p.43.