Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française, S. 81
78 GOUVERNEUR MORRIS
« Comment tout cela finira-t-1l, Dieu seul le sait: mais je crains que cela ne finisse mal. Je ne parlerai pas de ma propre situation ‘. Vous estimerez qu’elle est loin d’être plaisante. Je pourrais être populaire, mais cela ne serait pas bon. Les différents partis passent comme les ombres d’une lanterne magique et être bien avec l’un d'eux vous exposerait, au bout d'un court espace de temps, à la haine inextinguible des autres. Heureuse l'Amérique, gouvernée par la raison, par la loi, par l’homme qu’elle aime, qu’elle adore presque! C’est la gloire de ma vie de considérer cet homme comme mon ami et j'espère être longtemps honoré de ce titre. Dieu vous bénisse, mon cher Monsieur, vous garde et vous préserve ! Votre froid et ferme tempérament est actuellement d’une importance infinie pour notre pays ?. »
C'est peut-être attribuer à la morale, telle qu'on l'entend ordinairement, une puissance exagérée. Mais il est certain que les Anglo-Saxons ont, par-dessus tous les autres peuples, une qualité précieuse qui en a fait les maîtres et les modèles de la liberté moderne. C'est le respect de la loi, sans lequel la liberté politique et surtout la démocratie libre ne peuvent subsister. Il avait distingué la révolution américaine. Aussi, parlant des désordres qui éclatent en France, Morris écritil en 1791: « L'Amérique, aux pires de ses jours, était d’une bien meilleure condition, parce qu'au moins la loi pénale était appliquée, sans parler de la douceur des mœurs”. » Il ne peut comprendre.ceux de ses compatriotes qui, comme Thomas Paine, ferment volontiers les yeux sur les excès de la Révolution française : « Je lis aujourd'hui (22 février 1792) la nouvelle publication de Paine* et je lui dis que
. Il est alors ministre des États-Unis en France.
- T. IE, p. 37. Lettre à Washington du 14 février 1793.
. T. I, p. 493. Lettre à Washington, 27 décembre 1791.
4. L'ouvrage de Paine dont il s'agit ici est: Droits de l'homme, 2° parte,
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qui parut au mois de février 17y2. Voici en quels termes il est annoncé dans le Moniteur du lundi 26 mars 1792 (Réimpression de l’ancien Moniteur, 4. XL p. 735) : « Droits de l'homme, 2° partie, réunissant les principes et la pratique, par Thomas Paine, secrétaire du Congrès pour le département des Affaires étrangères, intitulé le Sens commun, traduit de l'anglais sur la troisième édition ; prix 2 liv. broché et 2 liv. 10 sous franco de port par la