Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

DEPUIS LA MORT DE MAZARIN JUSQU'A L'ÉDIT DE TOLÉRANCE 45

de conscience des Jansénistes, ce fut l’attitude des religieuses de Port-Royal. Tandis que les « Messieurs » au moyen de réserves mentales finirent par conseiller à leurs adhérents de signer le formulaire, ces simples femmes se laissèrent déporter dans d’autres couvents, séquestrer, excommunier, plutôt que de consacrer par leur signature un mensonge et une injustice. « Je sais bien, écrivait Jacque« line Pascal!, que ce n'est pas à des filles de défendre la « vérité ; mais, puisque par une triste rencontre les évêques « ont des courages de fille, les filles doivent avoir des cou« rages d’évêque et au besoin mourir pour la vérité !... Je « sais le respect que je dois à Messieurs les évêques, mais « ma conscience ne me permet pas de signer qu'une chose « est dans un livre où je ne l'ai pas vue. Que craignons« nous ? Le bannissement et la dispersion pour les religieuses, « la prison ou la mort, si vous voulez; mais n'est-ce pas notre « gloire, et ne doit-ce pas être notre joie? Peut-être on « nous retranchera de l'Église > Mais qui ne sait que per« sonne ne peut être retranché malgré soi, tant que lon « conserve l'esprit de Jésus-Christ? » Paroles admirables qui sont le cri éloquent d’une conscience vierge, protestant contre la violence qui lui est faite !

On connaît la suite du débat entre le Jansénisme et Louis XIV. La « Pax Clementina », imposée par la sagesse de Clément IX, ne fut qu'une trêve politique, qui ne satisfit personne, surtout pas les Jésuites qui en furent désolés. Cependant la lutte recommença en 1679, plus acharnée qu'auparavant. Arnauld fat exilé et se réfugia en Belgique où il fut bientôt rejoint par Nicole, le P. Quesnel et quelques amis, qui y jetèrent les fondements de l'église d'UtrechL. La question du cas de conscience (en 1701) donna lieu aux persécutions et conflits les plus violents. On refusa l’absolution, au tribunal de la pénitence, à quiconque ne voulait pas reconnaître que les cinq thèses condamnées étaient en

1, Leltre du 22 juin 1661 à la sœur Angélique de Saint-Jean.