Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

56 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

conscience, dans sa « Aéponse au livre de l’évéque de Meaux! ».

Les apologistes de la tolérance sont, il est vrai, moins nombreux dans le camp catholique ; mais, pour le bon renom de l'Église gallicane, ce furent les voix de savants et de penseurs de premier ordre qui s’élevèrent de son sein pour protester contre la contrainte exercée sur les consciences. On se souvient de Richard Simon intervenant en faveur des Juifs de Metz, accusés d’un crime odieux devant le Parlement et menacés d'expulsion, et ses relations amicales avec plusieurs ministres protestants. Un docteur en Sorbonne, « considérable dans l'Église par le rang qu'il y tenait », présenta, vers 1668, au Roi, un « Mémoire anonyme sur les affaires « de la Religion prétendue Réformée® ». Il y montra que la contrainte n'avait produit que de feintes conversions et conclut que « le Roi pouvait en conscience et devait en bonne « politique relâcher quelque chose de la sévérité de ses Édits

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A

« précédents en faveur de ses sujets de la religion pré-

« tendue réformée, mal convertis, et leur permettre quelque

A

« exercice de leur religion dans le Royaume. »

“Eénelon fut-il au nombre de ces tolérants évêques dont parle Saint-Simon ? Nous voudrions le croire et cela répondrait bien à la mansuétude de son caractère et à la sagacité de ses vues politiques. Malheureusement des documents, récemment publiés et non contestés*, établissent qu'avant d’être archevêque de Cambrai, l'abbé de Fénelon autorisa à l'égard des Réformés,

1. V.sur ces divers écrivains la thèse généreuse et bien documentée de M. Frank Puaux: Les Précurseurs français de la tolérance au xvue siècle. Dôle, 1880.

2 V. Charles Reap. Le Waréchal de Vauban et ses Mémoires (1689-93). Serait-ce M. Lefebvre (mort à Bruxelles en 1694) dont parle Sainte-Beuve, dans son Histoire de Port-Royal (tome V, p. 165) et qui prit la défense des protestants ?

3. O. Douex. L’/ntolérance de Fénelon, Paris, 1880.

I. Le Supérieur du Couvent des « Nouvelles Catholiques » à Paris (1676-1685). — II. Le missionnaire en Poitou et en Saintonge (1686). Comp. OEuvres complètes de Fénelon, Versailles, 1820, tome II, p+ 467. Fénelon, dans une lettre à Mme de Guyon, dit que : «s'il croyait qu'elle ne fût pas orthodoxe, il la brülerait de ses propres mains! »