Histoire des deux conspirations du général Malet

108 HISTOIRE DES DEUX CONSPIRATIONS

Il faut que la privation de la liberté exerce sur la plupart des âmes une bien fatale influence, puisqu’un caractère de la trempe de celui du général Malet n’y a pu résister.

En écrivant cette lettre, qui dut coûter à sa fierté de vieux républicain, Malet ne reniait certainement ni son passé ni ses convictions révolutionnaires ; il cédait seulement à l’ardent désir de recouvrer la liberté; et son patriotisme souffrit cruellement, j'en suis sûr, en s’abaissant ainsi devant l’idole exécrée qu’il avait voulu renverser. Ni le Jacobin Demaillot ni le démocrate Bazin n'auraient écrit une pareille lettre. Je n’en fais cependant pas un crime à Malet: ceux-là seuls seraient en droit de le faire qui ont passé par les rigueurs de la captivité sans avoir eu un moment de défaillance.

Et d’ailleurs, détenu arbitrairement, ayant affaire à un ennemi qui abusait à son égard du droit du plus fort, n’était-il pas absolument légitime de sa part d’user de tous les moyens pour rentrer en possession de sa liberté, le seul bien qui lui restât, et le plus précieux dont puisse jouir l’homme ici-bas? C’est là une question que je livre à l’appréciation des moralistes de mon temps.

L'influence de la femme du général ne fut sans doute pas étrangère à la rédaction et à l’envoi de