Histoire des deux conspirations du général Malet

154 HISTOIRE DES DEUX CONSPIRATIONS

Gependant ce ne fut qu’un mois avant l'événement que le général l’entretint de ses projets.

Jusqu'où le général poussa-t-il la confiance à son égard, et dans quelle mesure linitia-t-il à la conspiration? C’est ce qu’il est bien difficile de dire exactement. Malet lui conta que le Sénat était à la veille d'opérer de grands changements dans la forme du gouvernement, que le général Bernadotte, devenu prince royal de Suède, devait prêter son concours au régime appelé à remplacer l'empire, et il le crut de bonne foi. Oui, tel était le sang-froid, tels le ton dégagé et l'assurance avec lesquels Malet lui parlait de toutes ces choses, qu’il ne songea point à en remarquer l’invraisemblance.

Il crut sérieusement que le sénatus-consulte, dont il avait, de sa main, tracé plusieurs copies, était l’œuvre même du Sénat. Ce fut du moins sa constante affirmation dans ses interrogatoires devant le préfet de police Pasquier et devant la commission sanglante qui le voua à la mort. Je suis, pour ma part, tout disposé à y ajouter foi. En effet, Boutreux, malgré sa vive intelligence, avait une candeur et une naïveté singulières. L’air d’austérité du général, sa voix persuasive, sa grande science des hommes et des choses firent nécessairement sur l’esprit du jeune philosophe une très-vive impression,