Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

302 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

Sans avoir consulté ses collègues, Servan propose, à l'occasion de la prochaine Fédération du 14 juillet, de former un camp de vingt mille fédérés, qui serait destiné à protéger l'Assemblée et la capitale; de cette façon, on déjouerait des complots sans cesse renaissants. Ce projet est accueilli avec enthousiasme, mais le Roi refuse de l'approuver.

Sur ces entrefaites, Louis XVI renvoie ses ministres girondins et il les remplace par des Feuillants; il en résulte une grande fermentation : « Tout cela annonce encore un orage. Ce roi se comporte avec tant de duplicité et de mauvaise foi qu'il fait horreur aux âmes honnêtes. Il joue son trône, et vingt-cinq millions d'hommes, comme il ferait une partie de chasse {. »

En attendant, une grande animation règne dans Paris. On plante un arbre de la liberté devant la porte de chaque corps de garde, on va même en planter un aux Tuileries. L'Assemblée est dans le plus extrême embarras ; ce qui lui manque, c'est un homme :

« Un Mirabeau remuerait le sourcil, comme J upiter, et toutirait; mais il est dans la tombe, et nous n'avons que des paillasses de Mirabeau ?. »

La Fayette, qui est à l'armée, prend parti pour les nouveaux ministres; il écrit à l’Assemblée pour demander la suppression de tous les clubs.

Le Roï oppose son veto aux décrets sur la déporta-

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