Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 521 peuple, et les foudres de sa vengeance éclatent enfin de toutes parts ; éette vengeance est terrible, exemplaire et mémorable : le 10 août 1792 achèvera auprès de la postérité l'impression du 14 juillet 1789, et si la prise de la Bastille a consacré à jamais la conquête de nos droits, la chute du despotisme et le réveil du souverain opprimé, les grands événements de cette journée consacreront à jamais l'affermissement de notre liberté, le supplément de la révolution, la punition des conspirateurs et l’effroi de nos ennemis.

« La décision de l'Assemblée nationale sur le compte de La Fayette avait aigri tous les esprits, révolté toutes les âmes, ulcérées depuis longtemps des attentats sans nombre impunément commis contre la liberté : la plus grande fermentation régnait depuis deux jours dans la capitale, le second jour elle était à son comble lorsque les ombres de la nuit vinrent en augmentant le trouble et l'inquiétude des citoyens ajouter à l'audace des traitres que Paris recélait dans son sein. Plusieurs patriotes avaient été provoqués, insultés, attaqués ; les fédérés marseillais, assaillis par quelques satellites du Roi, avaient repoussé la force par la force ; en un mot, une profonde animosité enflammait les deux partis.

« L'orage gronde toute la nuit, chacun veille, les rues sont illuminées, hérissées de piques et de baïonnettes : vers les deux heures du matin, sans ordre donné, sans réquisition, sans signal, Paris retentit tout à coup du son de toutes les cloches et du bruit