L'oeuvre sociale de la Révolution française

SUR LES IDÉES MAITRESSES DE LA RÉVOLUTION 19

conception qui leur fut peut-être la plus chère, celle de l'éducation en commun et égale pour tous et uniforme. Ils ont bien compris que rien ne met plus de différence et plus d'inégalité entre les hommes que l'éducation et que, les hommes fussent-ils égaux par la nature, ils deviendraient inégaux extrêmement pour ètre élevés les uns d’une facon, les autres d'une autre. De Ià tous ces projets divers, mais se ramenant tous à une idée commune, d'éducation par la nation, c’est-à-dire par l'État, c'est-à-dire par le Gouvernement, de mainmise de l’État sur les générations nouvelles et, en quelque manière, de confiscation des jeunes par le Gouvernement, à dessein de les soustraire à l'influence de la famille et de leur donner comme des âmes égales, uniformes et nivelées. De là ce projet, toujours à l’état latent dans les fêtes révolutionnaires, quelquefois exprimé même du temps de la Révolution, très souvent proclamé depuis, d’une instruction intégrale donnée à tous, c’est-à-dire de la même instruction donnée à toutes les classes de la société, de manière à détruire peu à peu les inégalités produites par l'hérédité et de manière à arriver à ce qu'il n'y ait plus dans la nation non seulement de castes, non seulement de classes, mais non pas même de degré: projet qui amènerait forcément à la suppression par en bas de l'instruction primaire et par en haut de

l'enseignement supérieur; car n'est-il pas fâcheux