L'oeuvre sociale de la Révolution française

30 INTRODUCTION

et même tout d’abord dans les esprits des hommes de la Révolution le caractère d'une guerre pour l’idée, d’une guerre pour la diffusion d'une doctrine ou d’un dogme, d’une guerre de conquête intellectuelle, et d’une guerre de conquête morale. C'est le peuple qui combat pour l'égalité et non le peuple qui combat pour la liberté qui a de ces idées-là. Le peuple qui combat pour la liberté a tendance naturelle à ne voir que lui et à ne songer qu'à lui. Il ne veut pas de Gouvernement arbitaire; il détruit le Gouvernement arbitraire qui est chez lui, et peu lui importe que les autres peuples gardent le leur. Il veut des lois et n’être gouverné que par elles ; il fait des lois et établit, s’il le peut, des garanties de l’omnipolence de la loi ; et peu lui importe que l'arbitraire règne ailleurs. Il veut le Gouvernement du pays par le pays ; il organise un système parlementaire, el peu lui importe que le Gouvernement, ailleurs, soit personnel ou oligarchique. Quand il s'agit d'égalité, il n’en va pas tout à fait de même, surtout quand le peuple dont il s’agit est non seulement partisan de l'égalité, mais passionné pour elle. Il songe alors, confusément, mais il songe et non sans raison, que la liberté peut ètre nationale ; mais que l'égalité doit être universelle, sous peine de risquer de ne pas être. Qu'un peuple ait renversé toute aristocratie et qu'il soit environné de nations restées aristocratiques, il se