L'oeuvre sociale de la Révolution française

80 L'ŒUVRE SOCIALE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

de gouvernement agit prudemment en adoucissant son langage.

Assurément des orateurs comme Mirabeau, Tronchet ou Thouret n'étaient rien moins que des socialistes. Ils proclamaient néanmoins à l’envi que la propriété n'est nullement un droit primitif de l'homme, mais seulement une institution civile qu'il est permis de modifier. «Le propriétaire, disait Mirabeau, n’est que le premier des salariés; ce que nous appelons vulgairement sa propriété n’est autre chose que le prix que lui paie la société pour les distributions qu'il est chargé de faire aux autres individus par ses consommations et ses dépenses. » Un Malouet, un Target, un Talleyrand s'apitoyaient sur les maux nés de l'inégalité et déclaraient la misère du pauvre plus sacrée que l'opulence des riches. Ces discours n'avaient, le plus souvent, pour objet que de justifier des mesures très modérées, telles qu'une modification de l'impôt ou des lois de succession. Aussi la montée des idées démocratiques avertit bientôt les constituants de renoncer à leurs habitudes d'hommes sensibles, afin de ne pas donner par leurs discours un appui apparent aux tendances nouvelles.

Les girondins cessèrent plus difficilement leurs

dissertations humanitaires et utopiques. S'ils .

n'eurent pas de programme politique bien défini,

ils s’entendirent encore moins entre eux en matière