"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

« HYACINTHE MAGLANOVICH. »

233

Une belle planche en taille-douce représentant il Vaïvode Pervan di Coccorich, accompagne le récit de Fortis. Mérimée suivit son exemple et inséra dans la Gusla une lithographie qui représente son poète imaginaire. A l’inverse de ce qu’il avait fait à propos de Clara Gazul, il joignit ce portrait à tous les exemplaires de l’édition originale. Il est inutile de chercher sous les traits d’Hyacinthe Maglanovich la physionomie plus ou moins défigurée de Mérimée, comme l’ont voulu Ch. Asselineau et M. Leger 1 , mais il est juste de dire que, sous le rapport de l’exactitude, ce portrait ne laisse rien à désirer. MM. Tourneux et Leger se demandent où Mérimée s’était procuré les documents nécessaires à la confection de cette lithographie. Nous nous posons à notre tour la meme question. Le bonnet d’agneau noir, la ceinture large et multicolore, ornée d’un énorme couteau, ressemblent à ce qu’on voit sur la planche de Fortis, mais le reste, la guzla surtout et la position accroupie du vieux racleur qui n’en est pas moins authentique, ne peut avoir été dessinée que d’après un modèle. Nous avons examiné, sans succès, un grand nombre de relations de voyage, albums de costumes et autres publications antérieures à 1827, et il ne nous semble pas que le portrait d’Hyacinthe Maglanovich ait été copié sur aucune gravure. Il nous paraît plus probable qu’il fut dessiné d’après nature par quelqu’un qui avait visité les provinces illy-

1 Ch. Asselineau, Appendice à la bibliographie romantique, Paris, 1874, pp. 289-290. Il y dit que « Mérimée confessa dans l’avertissement à la réimpression de la Guzla que le prétendu portrait de Hyacinthe Maglanovich est le sien propre ». Louis Leger, dans la Nouvelle Revue du 15 juin 1908, p. 451. Cf. M. Tourneux, Prosper Mérimée, ses portraits, ses dessins, sa bibliothèque, Paris, 1879, p. 22.