"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

MÉRIMÉE COMMENTATEUR.

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bibelots, sans y attacher trop d’importance ; il est folkloriste amateur; il aime mieux des probabilités douteuses, où.se complaît son imagination un peu paresseuse, que des certitudes qui lui seraient une peine et un travail. Aussi le lecteur ne saurait-il exiger de lui que ce dont il s’est contenté lui-même. Et voici Mérimée à couvert des critiques avisées que des lecteurs mieux renseignés pourraient faire de sa science. Ce lui fut une habileté de se dire étranger à la fois au pays qu’il voulait faire connaître et à celui auquel il présentait son recueil. Mais s’il se posa dans sa préface comme un antiquaire « naïf et dénué de sens critique », dans la pratique il suivit le plus souvent les leçons d’un maître excellent, vrai savant celui-là, nous voulons dire Fauriel. Il lui devait déjà le goût de la poésie primitive; il lui dut aussi décomposer un livre dont l’esprit et la manière se rapprochent très sensiblement de ce que l’on trouve dans les Chants populaires de la Grèce moderne. Pour tromper complètement son lecteur, il emprunte à Fauriel la façon de présenter ses remarques. C’est ainsi qu’il va jusqu’à déclarer très sérieusement qu ici manque une stance 1 à un poème qu’il a lui-même composé tout entier, parce que, à l’occasion d’une poésie grecque authentique, Fauriel avait signalé qu’z? manquait à cette chanson quelques vers de la fin 1 . Ailleurs il dira : « Il est évident que cette intéressante ballade ne nous est pas parvenue dans son intégrité 3 . » Fauriel regrette-t-il de n’avoir pu trouver sur un certain sujet qu’une assez mauvaise chanson, incomplète d'ailleurs : « Je n’ai pu me procurer sur Androutzos que

1 La Guzla, p. 248. 3 Chants populaires de la Grèce moderne, t. I, p. 81. 3 La Guzla, p. 203.