"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

278

CHAPITRE V.

Quand il eut achevé, avec les yeux hagards, il reprit le crâne misérable dans ses dents, qui broyaient l’os avec la rage d’un chien 1 .

portaient en triomphe, ils osaient à peine la regarder, tant ils craignaient Chris tich Mladin et ses fils.

La dette est évidente et fut signalée par trois critiques du temps 2 . Toutefois il faut reconnaître que l’auteur de la Guzla réussit merveilleusement à combiner le récit de Dante et les renseignements de Fortis. De Dante, il tient la terrible tragédie de la faim, qu’il essaya pendant un certain temps de transformer en tragédie de la soif, où. la bestialité humaine dépasse les scènes les plus horribles de Germinal. ou de Tamango, si l’on veut; il lui emprunte même ce développement lent et graduel :

Dante : Déjà... l’heure approchait... Tout ce jour et la nuit suivante... Tout ce jour et l’autre... Lorsque nous atteignîmes le quatrième jour... Entre le cinquième et le sixième jour...

Mérimée : Depuis trois jours ils sont dans cette caverne sans manger... Cependant... Quand trois jours furent écoulés... Alors... Le quatrième jour est venu... Alors...

De Dante ensuite, l’anthropophagie, le regard silencieux et effrayant qui se laisse comprendre; enfin, le cadavre. Mais, pour finir sa ballade, Mérimée revint à Fortis, par qui il avait commencé :

Foktis : Ces heyduques mènent une vie... des loups; errant... grimpant... pour découvrir de loin leur proie... privés souvent de la nourriture.. .La

Mérimée : Alors... Mladin s’est levé, il s’est écrié : « Enfants, debout! mieux vaut une belle balle que l’agonie de la faim. » Us sont

1 Traduction P.-A. Fiorentino. - Moniteur universel du 13 août 1827 j Journal de Paris du 27, Foreign Quarlerly Review, juin 1828.