"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

les sources : fortis (sm7e).

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un tel mépris pour la mort, qu’il n’y a pour nous rien d’étrange à le voir se lamenter sur celui qui n’est plus ; c’est un ami, un parent qu’il regrette, et non la mort qu’il craint; ses plaintes sont mâles et telles qu’il convient à celui qui jadis, sans souci du danger, exposa sa vie dans maints et maints combats. Ce qui fait la supériorité de ces deux ballades sur VAubépine de Veliko, c’est que Mérimée ne s’est pas contenté d’y répandre une couleur toute artificielle par l’emploi de noms et de dénominations qui nous semblent étranges et par le choix d’un sujet qui fait frémir, mais qu’il a su, à ce qu’il nous paraît, sinon pénétrer tout entière, du moins découvrir certains sentiments de l’âme des « primitifs ». I 3 LA VIE DOMESTIQUE DANS « LA GUZLA » Une des choses qui ont le plus frappé Fortis, et à juste titre, c’est l’esprit de famille chez les SerboCroates. « Ces âmes simples, dit-il, non corrompues par les sociétés que nous appelons civilisées, sont susceptibles d’une délicatesse de sentiment qu’on voit rarement ailleurs. » Observateur intelligent, il avait bien remarqué le rôle important qu’avaitjoué, dans l’histoire nationale et sociale des Slaves méridionaux, cette organisation patriarcale qui unit quelquefois un village presque entier dans une grande communauté si pleine d’intérêt pour le sociologue moderne h Homme du

■ 1 Henry Maine- Sumner, De l’organisation juridique de la famille chez les Slaves du Sud, dans la Revue générale de droit, Paris, 1878.