La première Commune révolutionnaire de Paris et les Assemblées nationales

ET LES ASSEMBLÉES NATIONALES. : 219

délicatesse, vous n’auriez pas mêlée dans cette affaire et traduite ainsi devant le public européen. Vous avez été, en plus, vantard et faux, quand vous avez dit que vous étiez seul au ministère; car vous y aviez avec vous Fabre et Desmoulins. Qu'importe qu’ils ne fussent pas femmes! Ces deux hommes ont dû vous aider et beaucoup, car vous êtes, au su de tout le monde, singulièrement paresseux. Et, au reste, un ministre de la Justice, en un temps où les magistrats étaient choisis par le peuple et non par le ministre, était loin d’être aussi occupé qu'un ministre de l'Intérieur. Vos communications à l'assemblée, comme ministre, apparaissent dans les journaux assez rares et assez peu importantes, si nous les comparons à celles du ministre de l'Intérieur.

Si je me suis étendu sur ce débat, c’est que Danton me paraît s’y révéler assez différent du Danton franc et généreux que des admirateurs ont posé de pied en cap devant nous. Et puis une autre raison encore, et celle-ci plus sérieuse. Ce qui reste certain, d'après Danton et Roland d'accord sur ce point, ce qui reste certain c’est que le Conseil des ministres mit en délibération si, en cas d’un investissement imminent de Paris, tout ou partie du gouvernement ne ferait pas bien de quitter Paris, de ne pas s'y laisser enfermer. J'aurais, pour mon compte, une bien pauvre estime des gouvernants d'alors s’ils n'avaient pas eu même la pensée de se poser cette question et de la débattre. Ils se la posèrent. Après cela j'ajoute que si Roland conseilla la sortie du gouvernement, et si Danton conseilla de demeurer, ce fut Danton qui fut le moins intelligent et le moins vrai patriote des deux. Ce que conseilla Danton était une sottise et un acte pernicieux, inspiré par un point d'honneur faux, par une affectation théâtrale de courage, donc un acte d’égoïsme ‘.

1. Quand on est chargé du métier de ministre, on ne doit pas vouloir faire à la place le métier de hussard. Cela est aussi sot,-disons le mot, que le serait l’acte d’un général qui se piquerait de marcher au premier rang, parmi ses grenadiers. Je conviens, d’ailleurs, qu’en France beaucoup d'hommes seraient justement capables de s'écrier : « A la bonne heure, voilà un vrai général! »