La première Commune révolutionnaire de Paris et les Assemblées nationales

80 LA PREMIÈRE COMMUNE RÉVOLUTIONNAIRE DE PARIS

Et Robespierre? Il est invraisemblable qu'on ne lui ait pas soumis le projet. Il a été pressenti certainement. Passé ce point, nous entrons dans la conjecture. Mon hypothèse, c'est qu’il n’a jamais donné son adhésion formelle. J’en juge par sa vie d'avant, sa vie d’après. Rien de plus constant dans l'homme que là tournure de son esprit pratique, c'est-à-dire le genre des moyens, des procédés qu'il emploie de préférence pour ses divers buts. Robespierre, esprit de procureur et de procureur retors de l’ancien régime, fut en toute occasion l’homme qui se sert de la légalité, si c’est possible ou, à défaut, des apparences, de l'hypocrisie de la légalité. Au 10 août il n’était pas du tout pour l’émeute brutale, à coups de fusil; il voulait la déchéance du Roi par l’Assemblée, et pour cela il conseillait que le peuple, par son attitude, ses gestes, ses mouvements, contraignit moralement l’Assemblée à prononcer la déchéance. Au 2 juin 1793, de même, il préconisera « l'insurrection morale », dont l'emploi lui réussira effectivement. Au 9 thermidor, il voulait rester en prison, comparaître devant le tribunal; il comptait en sortir triomphant. Ses amis le forcèrent de venir à l'Hôtel de Ville et là lui mirent la plume en main pour qu'il formulât un appel au peuple : « Au nom de qui? » demandait-il, cherchant encore le moyen légal en apparence, quand le pistolet de Méda termina sa carrière. Telle fut sa méthode constante.

Mais pourquoi les autres gens susnommés adoptèrent-ils l’idée du massacre? — Parce qu’on était à la veille des élections, qu'ils se savaient en minorité, même à Paris, et

et par les accusations de leurs adversaires et par les aveux de leurs amis, Nous entendrons plus loin les témoignages de Marat, de Robespierre, de Guermeur, les dénonciations et les plaintes multipliées apportées à la Convention contre les procédés des agents de la Commune. Sur ce sujet, il n’y a pas d'incertitude.

Quant à Danton, à Desmoulins, à Fabre d’Églantine, ils ont élé à tout le moins gagnés au massacre dès le 2 septembre au soir; cela est démontré par le fait de la circulaire Maratiste, cette circulaire qui émut à si juste titre les provinces, auxquelles elle arriva sous le contre-seing du ministre de la Justice. Cette circulaire, dont nous parlerons longuement, parlit de Paris dès le 3 septembre et jours suivants.