La question de l'Adriatique
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pourra-t-elle fournir un pareil effort? Pays montagneux et pauvre, sans industrie, peuplé d'agriculteurs, et de pêcheurs, où trouvera-telle les innombrables millions qu'il lui faudrait pour transformer Sebenico et Cattaro en fortes bases navales, et pour couvrir l’Adriatique de cuirassés et de croiseurs ? Elle comptera tout au plus, même si toutes ses espérances se réalisent, 11 à 12 millions d'habitants, en face d'une Italie qui sera quatre fois plus riche, quatre lois plus populeuse, quatre fois plus forte. Et même si, malgré tous les obstacles, elle rêvait de posséder un jour une marine de guerre, non seulement cette marine resterait sensiblement inférieure à celle de sa voisine, mais, emprisonnée dans l'Adriatique, que pourraitelle contre une puissance qui détiendrait Pola, Venise, Bari, Brindisi, Otrante et Vallona? L'Italie trouverait-elle une force réelle à posséder des territoires slaves, et à incorporer dans ses frontières près de 1.600.000 sujets récalcitrants? L'histoire est là pour nous montrer à quels résultats peut conduire une pareille politique. N'est-ce pas pour l'avoir pratiquée que l'Autriche a perdu, le jour du danger, l'appui de l'Italie, et que jamais il n'a pu y avoir entre ces deux nations une réconciliation