La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

134 LA REPRÉSENTATION DES ARISTOCRATIES

« tant, le tenant sous sa dépendance absolue, il aurait « été à peu près tout ; il aurait été quoi ? L’aristocratie « vénitienne, avec son livre d’or, avec son doge fas« tueux et nul... M. Sieyès, esprit profond et élevé, « sincèrement attaché à la liberté de son pays, avait « parcouru en dix ans ce cercle d’agitations, de terreurs, « de dégoûts, qui avaient conduit la plupart des répu« bliques du Moyen âge, et la plus célèbre d’entre elles, « celle de Venise, au livre d’or et à un chef nominal. € Il avait abouti à l'aristocratie vénitienne..…. € Mais on n’improvise pas l'aristocratie, on n'impro« vise que le despotisme. Cette société ne pouvait se « reposer que sur les bras d’un homme puissant. On « allait tout admirer, tout admettre de cette constitution « extraordinaire, tout, sauf le grand Electeur richement « doté, et en spÉainee oisif, On allait le remplacer par « un chef actif et énergique, par le général Bona« nue et, un seul ressort changé, cette constitution evait, sans aucune complicité de la part de son « auteur, aboutir au despolisme impérial. .. (1) ».

Une opposition s'élève, en effet, dans la commission dont Boulay est devenu président : celle de l’homme à la mesure de qui la constitution sera établie. Ni les combinaisons de Sieyès ne le satisfont, ni les projets transactionnels de Boulay et de Rœderer. Il connaît le danger de cette aristocratie qui doit annihiler le pouvoir exécutif — qu'il se réserve — et absorber celui qui le détient. Il attaquera donc tout le plan de Sieyès, « comme aristocratique et attentatoire à la liberté et à la souve-

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(1) Thiers. Op. cit., &. I, p. 86-87.