La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

LE SÉNAT SOUS LE CONSULAT 149

un corps de révolutionnaires, encore moins un corps de contre-révolutionnaires, il lui faudra bien créer un corps nouveau, une aristocratie nouvelle, selon un principe et pour un caractère prudemment déterminés.

En tous cas, une modification s'impose ; l’heure done est venue :

« Le Sénat a été manqué ; il n’a pas assez d’occupa«tion. On n'aime pas, en France, à voir des gens bien « payés pour ne faire que quelques mauvais choix. « Regnaud était un de ceux qui criaient le plus fort que « la garantie de la nation était dans le Sénat ; mais, « pour cela, il aurait fallu lui donner d’autres attribu« tions. On ne peut pas laisser les choses comme elles sont; (il vaut peut-être mieux donner tout de suite une forte « réparation à l'édifice que d'attendre qu'il tombe en « ruine.» (Paroles citées par Thibaudeau).

Le Sénat, lui-même, semble impatient d'œuvres ou d'honneurs. Une courte opposition a manifesté l'ennui de sa « dignité oisive » et l’ardeur d’une jalousie commune d'ailleurs à tous les grands corps, contre le Conseil d'État qui seul s'associe à « la gloire des grandes choses qui s’accomplissent chaque jour » (1).

Ces modifications constitutionnelles que chacun souhaite seront décrétées à la suite du plébiscite qui rati-

(1) «Aïnsi, celte société que M. Sieyès avait cru assoupir dans une espèce de régime aristocratique, à l'exemple de Venise ou de Gênes, s'agitait encore comme un malade qui a un reste de fièvre el pouvait être soumise, contenue par un maitre, mais point endormie d’un paisible sommeil, ainsi que l'avait espéré son auteur. » Thiers, €. IT, p. 320.