La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

THÉORIE DE CHATEAUBRIAND 233 aristocratique (« ou républicaine »), par où elle défend ses propres prérogatives et la liberté (1).

« On voit par là que cette noblesse n’est point du « tout incompatible avec nos nouvelles institutions : » qu’elle n’est point en contradiction avec la nature du «gouvernement. ; qu'il a seulement divisé les élémens « qui la composaient, séparé son double principe ; et « que la noblesse subsiste à la fois dans la Chambre des « Pairs comme pouvoir aristocratique, et hors de la « Chambre des Pairs comme force monarchique.

« Elle n’exerce plus ses droits politiques, parce qu'elle «en a remis l’usage à la Chambre des Pairs, qui la re« présente sous les rapports républicains (2) ; mais elle

(1) La liberté est, selon Montesquieu, « cette tranquillité d’esprit qui provient de l‘opinion que chacun a de sa sûreté », laquelle n’est réalisée que dans un « gouvernement tel qu’un citoyen ne puisse pas craindre un autre citoyen » ; ce gouvernement est seul celui «où les trois pouvoirs sont séparés, et où la puissance législative est confiée à deux corps qui ont leurs assemblées, leurs intérêts séparés, et dont l’un est le corps des nobles ». Ces principes admis, et toute porte à croire que Chateaubriand restait à leur égard disciple fidèle de Montesquieu, la liberté générale est la condition des citoyens dans une monarchie du type britannique, et la liberté de la noblesse est plus particulièrement la faculté pour elle d'exercer « ses droits constitutionnels ».

(2) C’est à-dire aristocratiques, par antithèse à monarchiques. Dans la même acception les institutions romaines étaient « républicaines ». Chateaubriand écrit en effet : « quand elle {la noblesse) agit pour elle-même et d’après la nature de sa propre constitution, elle est mue par la liberté; elle est républicaine, aristocratique » (ibid., p. 80).