La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

L'ANCIENNE NOBLESSE 245

nouvelle s'ouvre pour vous, auprès de cette ancienne carrière militaire qui ne vous est point fermée. Vous pouvez être élus membres de la Chambre des députés ; redoutables à ces ministres qui vous repoussoient autrefois, vous serez courtisés par eux (1). Devenus pairs du royaume, appelés peut-être au timon de F'tat, nouveaux chefs de votre antique famille, et patrons de votre province, ce sort éclatant sera l'ouvrage de vos propres mains. Qu'est-ce que l’ancien gouvernement pouvoit vous offrir de comparable? Cela n'est-il pas un peu plus beau que de mourir capitaine d'infanterie à soixante ans ? Nous ne vous entretenons iei que de vos intérêts matériels: nous ne vous parlons pas de cette gloire, partage certain de celui qui consacre ses jours à défendre le Roï, à protéger le peuple, à éclairer la patrie, de celui qui soutient, avec les autels de la religion, les droits de la raison universelle, et qui combat pour les principes de cette liberté sage, sans laquelle, après tout, il n’y a rien de digne et de noble dans la vie humaine (2). »

L'ancienne noblesse trouvera donc dans l'État mo-

derne le lieu d’une activité nouvelle plus glorieuse, si toutefois, guidée non plus par l’exemple de ses aïeux, mais de la nobility britannique, elle transforme son caractère, ses traditions, si elle ne s’entête plus dans l'isolement des châteaux et de la Cour, si les familles les plus illustres participent au gouvernement et à la législation dans les ministères, dans les hautes fonc-

(1) 1814. (2j Chateaubriand. Aéflerions, p. 123 à 126.