La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

296 LA REPRÉSENTATION DES ARISTOCRATIES

une idée qu'on ne saurait arracher du cœur de l’homme et que l'histoire de l'humanité présente un progrès continu vers elle, allant de la division en castes à l'esclavage, de l'esclavage à la féodalité, de la féodalité à la noblesse. Concevant à la fois la nécessité de protéger la famille souveraine par une classe qui en soit comme le rempart, et celle de diviser le Corps législatif, il était naturellement amené à concilier ces deux principes en établissant une Chambre haute héréditaire. Sans doute, de grandes difficultés s'opposent à ce projet : la création d’une noblesse engage non seulement le respect des générations futures, mais celui des contemporains mal disposés à s’incliner devant un ordre qui n’a rien pour eux de lointain et de mystérieux ; il n’ignore pas non plus « les géants de la « féodalité devenus graduellement des nains », ni que « le gouvernement impérial n’a malheureusement pas laissé la noblesse aussi pure qu'il l’avait trouvée », ni que « quand la Restauration s’est opérée, il n’a plus été question des réparations récemment obtenues mais des sacrifices faits anciennement »; que, « en écoutant des plaintes fréquentes contre l'oppression d’un régime et contre l’ingratitude de l’autre, il est consolant de penser que certains noms illustres ont profité de tous les deux » et que « si la noblesse efface de ses annales cet épisode étrange », « la mémoire nationale s’en souvient, et de la sorte l’élément de respect et de considération qui semblait s'offrir le plus naturellement à nous