La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

302 LA REPRÉSENTATION DES ARISTOCRATIES Napoléon lui-même avait failli créer une « pairie héréditaire ». Et s’il ne l'avait pas créée, empêché peut-être par la chute de l’Empire seulement de réaliser ce vœu, il en avait du moins jeté les germes et provoqué les tendances (mars 1808), en autorisant les sénateurs à transmettre leur titre de comte à leurs descendants directs et légitimes, de mâle en mâle par ordre de primogéniture, c’est-à-dire en organisant la transmission héréditaire d’un démembrement de leur dignité.

Aïnsi deux forces avaient concouru à rendre la dignité sénatoriale héréditaire : l’une qui tenait à la constitution même de la société impériale et de ses éléments ; l'autre, involontaire, née destendances égoïstes des individus et des groupes, et qui se composaient enfin.

« L'hérédité des pairs est la preuve que l'Empereur veut rendre ce corps indépendant », énonça une brochure (1). Mais une autre protesta contre cette innovation « demandée par deux cents prétendus publicistes et repoussée par 999.800 Français ! » (2), et, au reste, franchement impopulaire. « N’est-il pas absurde, écrivait Viennet, que la loi soit faite par des sénateurs imberbes, descendus mollement du lit voluptueux de leurs maîtresses, cherchant un lit de repos sur les coussins de la pairie, chancelant de fatigue, sommeillant de luxure et d’ennui ? »

(4) Martin. Les Puissances alliées et la France, 1815. (2) Viennet. Opinions d’un homme libre sur la Constitution, 1815.