La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795
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des hommes, & des affaires, il s'était laiffé porter à ja tête d’une faction populaire, & maintenant il fe croit en droit de lui reprocher avec amertume, des écarts & crimes qui ne devraient point le laiffer lui-même tranquille avec fa confcience. Déplorable exemple de l'effet des révolutions qui, en bouleverfant les Etats les plus heureux, flétrifient les individus les plus eftimables! Elles les arrachent aux feules fonctions auxquelles ils puiffent être propres, & les élèvent bientôt à des poltes où leur incapacité les expofe inévitablement à voir changer en mépris, & même en haine, l’eftime dont ils jouiffaient dans leurs vocations fubalternes.
Le troifième parti eft celui que les Jacobins Genevois tentent toujours de flécrir par l’imputation d’Ariftocratie; comme s’il pouvait exifter dans l’univers uneariftocratie plus dévorante que celle qu’ilsont réufñi à exercer eux-rnêmes depuis trois ans! Quoique les chefs naturels de ce parti, c’eft-à-dire les rmagifirats deftitués en 1792, fe trouvent, pour la plupart, difperiés ; il fe groffit à vue d’œil de la foule des révolutionnaires convertis, qui gémiflent fur le pañlé, mais qui ne favent quelle route prendre pour reconquérir leurs loix fondamentales, & pour en rappeler les dignes Miniftres. (Ce parti, jufqu’ici le moins prononcé, réunit déjà le plus grand nombre; & il foupire après le rétabliffement de l’ancien régime, fans ofer néanmoins exprimer trop. fortement ce vœu, tout ardent qu'il eft, ou fans fe flatter de le voir réalifer, avant que le dénouement de la Révolution Françaife permette à Genève de s'affurer s’il lui fera permis de
rétrogader