La Révolution française et ses détracteurs d'aujourd'hui

LA RÉVOLUTION ET L'ÉGLISE 57

propriété relativement aux particuliers. Les corps au contraire, n'existent que par la loi. Par cette raison, elle a sur tout ce qui les concerne et jJusqne sur leur existence même, une autorité illimitée... »

Remarquons-le du reste : cette thèse était conforme à l’idée que la royauté avait toujours eue de son droit, relativement à ces mêmes biens d’° Église. Là encore, il devait y avoir, dans l’œuvre de la Révolution, non pas méconnaissance du passé, non pas rupture consciente ou inconsciente avec d’utiles ou vénérables traditions, mais épanouissement audacieux et comme miraculeux d'une tradition utile : bref, c’était là encore l’histoire de France qui allait continuer en accélérant son train jusqu’au prodige.

Les rois avaient plus d’une fois songé à prendre les biens du clergé, comme choses appartenant à l'État, et même, à certaines heures critiques, des portions de ces biens furent sécularisées et aliénées au profit de l'État (1). En 1749 (Taine luimême l’a rappelé) un édit fit défense à l’ Église de recevoir aucun immeuble, sans lettres patentes du roi enregistrées au Parlement ; et en 1764, lorsque Louis XV abolit l’ordre des Jésuites, il n'hésita pas à vendre tous leurs biens pour en verser le produit au Trésor.

A la Constituante, un dernier argument, produit par Le Chapelier, acheva la victoire de la gauche. « Vous avez, dit-il, voulu détruire les ordres,

(1) Voir la Grande Encyclopédie, t. VI, p. 740.