Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916
L'ENFER SUR L'ILE ENCHANTÉE 217
cha l'écorce des arbres pour s’en repaitre. Ce que l'être humain, tant qu'il possède encore un souffle de vie, peut supporter de souffrance est quelque chose d’immense. 15.000 sur 30.000, la moitié, parvinrent à la mer.
Ils se demandèrent alors entre eux, par gestes, car ils n’avaient plus de voix : « Où sont les bateaux ? » Ils n’en voyaient point. Un parut cependant à l'horizon, mais ce fut pour couler aussitôt. Les sous-marins ennemis empêchaient les secours. La colonne alors voulut approcher du rivage. C'était devant Valona. On leur dit : « Attendez encore. Peut-être un bateau finira-t-il par accoster ! » Les recrues attendirent. Quand le bateau arriva, ils n'étaient plus que 10.000.
Le bateau, avec son chargement de cadavres ambulants, vingt-quatre heures plus tard, jeta l’ancre devant Corfou. La courte traversée avait coûté la vie à 1.000 autres misérables encore. Eux qui avaient eu si faim et pendant si longtemps, maintenant