Le pacte de famine, histoire, légende : histoire du blé en France

PREMIÈRE PARTIE. — CHAPITRE VII 45

de son royaume... Sa Majesté crut prudent d'exciter le commerce à faire venir des grains de l’étranger, et Sa Majesté promit, par un arrêt de son conseil du 23 novembre, une prime de 40 sous par quintal de farine, et de 30 sous par quintal de blé, sur toutes les quantités de ces denrées qui seraient importées des États-Unis d'Amérique dans l’un des ports du royaume‘. » Le 11 janvier, le Roi accorda des encouragements analogues à l'importation des grains venant de tous les pays de l'Europe. « Cependant Sa Majesté, justement inquiète que le royaume ne reçût pas des secours équivalents à ses besoins, et l'expérience ayant instruit que peu de négociants veulent se mêler du commerce des grains, lorsque les prix sont chers et fixent les inquiétudes du peuple, Sa Majesté crut devoir s'assurer d’un approvisionnement extraordinaire, en faisant acheter dans l'étranger, de ses propres deniers et à ses périls et risques, une quantité considérable de blés et de farines, et le Roï confia ces commissions aux régisseurs des vivres et de la guerre, ils ont été autorisés à faire des achats au dehors dès le mois de novembre (1788), et depuis cette époque, ils n’ont jamais été un moment dans l’inaction. Les achats faits dans l'étranger par les ordres de Sa Majesté et pour son compte s'élevaient à plus de vingt-cinq millions. Indépendamment de ces achats faits pour le compte du Roi, plusieurs villes ont fait venir des approvisionnements de l'étranger, et le Roi en a aide quelques-unes de son trésor et d’autres de son crédit 2. » Grâce à cette prévoyante sollicitude du Roi, de grands malheurs furent empêchés : non content de venir en aide à la généralité de Paris, on dut envoyer des secours en blé à Reims, Caen, Rouen, Orléans, Lyon, Nancy. On fit venir également des blès de Marseille, et le Roi « encouragea les officiers municipaux à faire des efforts extraordinaires, en leur promettant de diminuer de son trésor royal la perte de ces opérations. Le Roi accorda des indemnités aux boulangers de Paris et « soit à Paris, soit dans d’autres lieux, il fit vendre les blès qu'il avait tirés de l'étranger à des prix qui lui occasionnèrent une perte immense. » La Picardie, le Languedoc, les généralités d’Auch, de Bordeaux, de Montauban furent pareïllement secourues par ces blès

4 Cette prime n'avait d’abord été établie que jusqu’à la fin de juin, afin de hâter l’arrivée des secours ; le 20 avril 1789, on prolongea le délai jusqu’au {7 septembre suivant.

2 Mémoire instructif. par le directeur général des finances,