Le pacte de famine, histoire, légende : histoire du blé en France

PREMIÈRE PARTIE. — CHAPITRE IX 67

vertes d’un meunier de Senlis, nommé Buquet, que Malisset avait « fait venir à la réquisition de M. Duperron, administrateur de l'hôpital général de Paris, lequel lui avoit demandé, pour la direction des moulins de cet hôpital, quelqu'un d’intelligent. Buquet y travailla sous les yeux de l'administrateur ; et celui-ci publia le résultat de ses operations. On imagine sans peine l'éclat qu'eut un pareil succès dans une ville où les têtes s’échauffent si aisément. Les écrits des économistes prônèrent la nouvelle méthode. Elle se répandit avec une rapidité surprenante ‘ » et bientôt Paris et l'Ile de-France ne connurent plus guère que la mouture économique.

Les procédés employés par Malisset n'étant plus au niveau des progrès de la science, Turgot, obéissant à l'opinion publique, chargea donc le lieutenant de police Le Noir de résilier le marché que Malisset avait passé avec l'Etat et de s'entendre avec les frères

‘ Leleu ? pour le remplacer.

Les frères Leleu souscrivirent en conséquence, le 1er septembre 1774, envers le Roi, un traité dont voici la substance :

1. Le Grand d’Aussy, cp. cit. I, 71. La mouture économique perfectionnée du Sieur Buquet ne recut pas un accueil aussi empressé en province qu’à Paris. « Depuis quelque temps néanmoins, écrivait Le Grand d’Aussy en 1782, elle s’est introduite avec succès dans plusieurs villes ; et je tiens du sieur Buquet lui-même, et du sieur Leleu, administrateur des moulins de Corbeil pour lapprovisionnement de Paris, que les années dernières ils avoient formé chez eux des élèves pour différens cantons de la France et notamment pour la Gascogne. » (Op. cit. I, 72.) En 1783 on put fonder une école publique et gratuite (le boulangerie. Les premiers moulins économiques de Corbeil avaient été construits par M. Dransy, ingénieur du Roy, qui avait obtenu, le 42 novembre 1765, le prix proposé par l’Académie des sciences sur cette question : Perfectionner la construction des moulins à eau, surtout de leurs parties intérieures. Le secrétaire Condorcet, en couronnant M. Dransy, l’invita à continuer ses recherches sur un art dont il s'était occupé et si digne, par son objet, de toute l'application d’un homme instruit. (Mém. Bachaumont, xxx, 57.) En 1767 le docteur Paul-Jacques Malouin avait publié un ouvrage sur la boulangerie et la meunerie, ouvrage qui est encore la base de tous les travaux analogues. (Description et détails des arts du meunier, du vermicellier et du boulanger, avec une histoire abrégée de la boulangerie.) En 1778, l’apothicaire des Invalides, Parmentier, commenca sa réputation par un bon livre sur le même sujet, Dans son Parfait Boulanger ow traité complet sur la fabrication et le commerce du pain. Parmentier explique dans les plus grands détails (p. 181 et suivantes) les procédés et les avantages de la mouture économique,

2. Au mois d'octobre 1779, voulant avoir des renseignements sur le rendement de la farine et la quantité de pain nécessaire à un travailleur, Le Grand d’Aussy S’adresse à cet effet au sieur Leleu, « homme aussi officieux qu’intelligent.. et qui, par le nombre des moulins qu’il a sous ses ordres ainsi que par la multitude de personnes qu’il est journellement obligé de nourrir, pouvoit, mieux que qui que ce fût, lui donner le vrai produit d’une certaine quantité de farine et du pain, » Le Grand dAussy, op. eit., I, 73.