Le système continental et la Suisse 1803-1813
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toute l’Europe, le système continental avait mis cette question à l’ordre du jour; en Suisse, elle éveilla immédiatement l'attention des sociétés économiques et des gouvernements. On chercha à perfectionner l’élève du mouton de deux façons : par l’amélioration de l’entretien du bétail, de sa stabulation et de sa nourriture; par l’épuration de la race indigène au moyen de croisements étrangers, surtout avec les mérinos espagnols ; cette dernière question notamment excita en Suisse un vif intérêt.
Cette campagne, à laquelle prirent part un grand nombre d’hommes intelligents et actifs, eut à surmonter de grosses difficultés. Elle se heurtait d’abord à la méfiance obstinée de l’agriculteur à l’égard de toute innovation. Le paysan redoutait que l'élevage du mouton ne portât préjudice à celui des bêtes à cornes; dans les communes où subsistait la jachère morte, il refusait de laisser les moutons user du droit de libre parcours jusqu'alors réservé aux seules bêtes à cornes. Dans les districts industriels, où il eût été urgent d'introduire le travail de la laine, le pays, cultivé d’une façon plus intensive, ne possédait plus les étendues de pâturages indispensables. Pour améliorer la qualité de la laine, il fallait ne faire qu’une seule tonte annuelle et par conséquent se résigner à voir diminuer la quantité. Le mérinos se montrait moins prolifique que la race ordinaire et l’on perdait le bénéfice de la vente des agneaux. D’une façon générale, les conditions climatériques se prêtaient peu à l'introduction des bêtes espagnoles, très sensibles au froid 1.
Dans quelques cantons, rien ne put venir à bout de la routine, mais on arriva sur d’autres points à des résultats encourageants. Ce mouvement se manifesta d’abord en Suisse occidentale. On a vu quelle énergie Charles Pictet déploya à Genève pour développer de front l’élève du mouton et la fabrication des tissus de laine. Il obtint avec son troupeau de
4 Arch. Zurich, Oek. Prot., 129, juillet 1808; — Recès, 1812; — Neuer Sammler, 1809, p. 166.