Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma, S. 100

88 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

Puis, se livrant à une chaleureuse apologie de cet artiste, il prédisait une destinée brillante au nouveau théâtre, soutenu par des artistes d’un grand talent.

La riposte des « Comédiens-Français ordinaires du roi » ne fut pas moins vive. Ils protestèrent énergiquement contre toutes les imputations de M. Palissot, qu’ils traitèrent d’imposteur. Ils soutinrent qu’ils seraient fondés à réclamer la protection des lois contre ce dernier dont les imputations calomnieuses tendaient à les déshonorer, etc... »

Enfin Chénier lui-même, se jetant dans la mêlée,

pour l'établissement d'un second Théâtre-Francçais et réforme des autres spectacles. Ouvrage présenté à la municipalité de Paris par M, Caïlhava. A Paris, chez Royer, quai des Augustins. Î

Il y a déjà eu trois éditions de cet ouvrage. M. Cailhava disait dans la dernière : « Je le répète et je ne cesserai de le répéter : il nous faut un secoND THÉATRE-KRANGAIS, qui, en fournissant à Thalie et Melpomène une carrière plus vaste, soit un sujet d'émulation pour Les comédiens et un objet de comparaison pour le public; et nous l'obtiendrons tôt ou tard, ce second théâtre. M. l'abbé Raynal, qui se connait en révolution ef qui m'aime assez pour ne point me Jlatter, n'a prédit que je verrais celle-ci, et ma félicité sera d'avoir porté les premiers coups.

ee « Concçoit-on rien de plus piquant, dit-il, que la lutte de deux comédiens, qui, dans les mêmes scènes, les mêmes rôles, feront à l’envi des efforts pour y découvrir des beautés, des finesses, des nuances échappées à leurs émules, ou pour nous les rendre avec plus de grâce et d'énergie? Ce combat tournerait à la fois au profit du public et de l'art... »

« On sent bien, continue-til, que la Comédie-Française veut se réveiller de sa léthargie; tout l'avantage est de son côté, puisque la rivalité ne fait que la rajeunir, en rajeunissant même les pièces les plus usées. Elle me boude pourtant, cette ingrate et trop ingrate maîtresse! n'im orte, je veux l'aimer toujours pour elle-même. » — « Mon plan, ajoute-t-il, peut nous rapprocher, je crois, de ces jours heureux où Corneille, Racine, Molière s'illustraient sur des théâtres différents, et volaient de front à la gloire. Quel dommage, grand Dieu ! sice beau siècle n’eût eu qu'une Troupe Françoise! Qui vous assurera que les Scudéri, les Boursault et peut-être les Pradon, déjà maîtres de la lice, n’en auraient pas fermé la carrière aux vigoureux athlètes qui les ont si bien terTassés? »