Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma, S. 111
LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION 99
VI
Faisant suite au Mari directeur ou le Déménagement du couvent, par Carbon Flins, et aux Victimes cloitrées, de Monvel, dans le même ordre d'idées, Mélanie, ce drame en trois actes et en vers de La Harpe, fut représenté, seulement le 7 décembre 1791, sur le théâtre de la République, bien qu'il eût été composé sous l’ancien régime et imprimé dès 1770. Mais, ses attaques violentes contre les institutions religieuses et monastiques l’avaient fait défendre par le souvernement (1). Toutefois, il avait été lu alors, non sans intérêt, chez les ministres obligés de l’interdire (2). Voltaire lui-même, soit par conviction, soit parironie, avait écrit à l’auteur : « l'Europe attend votre Mélanie >».
On comprend que la première représentation, désirée et attendue avec impatience, attira une foule tumultueuse. Cependant, quoique bien défendue par M°° Desgarcins (Mélanie), Talma (Monval) et Monvel (le Ministre des autels), la pièce, manquant d'action et d'intérêt, n’obtint qu’un succès médiocre.
(1\ Mélanie avait été inspirée à La Harpe, d'après ses amis, par le suicide d'une pensionnaire de l’'Assomption (Correspondance de Grimm, vol. VI.
(2) Lu, notamment, chez M. de Choïseul, alors premier ministre, celui-ci s’étonna qu'un si bon ouvrage ne fût point imprimé, et, sur l’aveu de l’auteur que ses ressources ne lui permettaient pas de faire cette dépense, ce fut le ministre qui se chargea des frais d'impression.
C'est dans ce drame larmoyant de La Harpe, qu’en 1834, M'° Plessy, âgée de 15 ans, devenue plus tard Me Arnould Plessy, s’essayait sur le petit théâtre de la rue de Lanery, dirigé par Saint-Aulaire. A la suite de cette épreuve, le 4 mars de la mème année, elle débutait à la Comédie-Française.