Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

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gatoire et l’assurance du Paradis : tout s'obtenait moyennant finance suffisante.

L'anathème servait à la fois pour acquérir et pour garder. Les usurpations par corruption ou violence, les fabrications de fausses chartes ef de faux titres (1), furent, durant de longs siècles, facilitées et par l'impuissance des juges civils et par l’omnipotence de l'Eglise, excommuniant quiconque osait toucher à ses biens, inviolables propriétés des saints et de Dieu.

Les Croisades ne servirent pas peu à augmenter les richesses du clergé. Les moines qui les préchaient avaient persuadé à ceux qui couraient délivrer le tombeau du Christ qu'ils devaient confier à l'Eglise la garde de leurs domaines et lui en abandonner la succession s'ils ne revenaient pas de Palestine.

L'inquisition et l’extermination des héréliques rapportèrent aussi d'énormes biens, notamment aux évêques du Languedoc, devenus les plus nombreux et les plus riches de France depuis l’effroyable guerre des Albigeois.

Des naïvetés et terreurs populaires, — surtout à l'époque de l'an 1000, annoncéescomme devant être la fin du monde, — on lira ce qu'on voulut, jusqu'à l'abandon de populations entières en un servage, que l'Eglise put maintenir, jusqu'à la nuit du 4 août 1789, sur plus d’un million de Français (2).

La vente en gros et en délail des indulgences, dont le scandale fut une des causes de la Réforme au seizième siècle, était d’un trop bon profit pour ne pas être reprise,

(1) Une fabrique de fausses chartes s'était régulièrement établie à Saint-Médard de Soissons; le moine Guernon s'en confessa avant de mourir, mais les nombreux monastères enrichis grâce à lui s’abstinrent de rendre, et la prescription ratifia l’escroquerie. (2) Ch.-L, Chassin, l'Eglise et les derniers serfs, 1880, chez Dentu.