Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits
8 LES CAHIERS DES CURÉS
Il avait beau être le premier Ordre, il ne formait plus un corps homogène, animé d’un esprit commun, marchant avec une discipline inflexible au même but. L'unité doctrinale et politique, que Bossuet et Louis XIV semblaient avoir rétablie dans l'Eglise gallicane par la déclaration de 1682, avait été de nouveau brisée par la bulle Unigenitus, en 1713. Vaincus, en 1762, par les jansénistes, chassés de France, reniés et supprimés par la papauté, les jésuites n’en avaient pas moins contribué à enveénimer la division parmi les ccclésiastiques et parmi les fidèles (1). Cette division morale, au bout de plus d’un demi siècle de troubles d’une violence inouïe, n’était apaisée qu’en apparence, lorsque l'approche des Etats généraux, obligeant chaque corps, chaque classe à dresser son bilan, son compte ou examen de conscience, en présence de l'opinion publique surexcitée, fit apparaitre les plus implacables antagonismes d'intérêts, comme d'idées, au sein des deux premiers Ordres de l'État.
La forteresse des priviléges, quand la nation se leva pour l'assiéger, était ouverte de toutes parts, démantelée d’avance par des mains de nobleset d’ecclésiastiques. La pompeuse unité du Roi-Soleil, assise sur l’asservissement universel, laissait voir en tombant deux ou trois noblesses enncmies et trois ou quatre clergés se dévorant l'un l’autre.
(1) V. le Clergé de 89, par Jean Wallon, livre 1.