Les fêtes et les chants de la révolution française

LA FÊTE DE L'ÊTRE SUPRÊME. 444

Marie-Joseph Chénier, plus jeune de deux ans que son frère André, entre dans la vie publique en 1789, où il fait représenter son Charles IX, bientôt suivi d'Henri VII, Galas, Gaïus Cracchus, Fénelon. Dès 1790 il compose son beau Ghant du 14 Juillet, et multiplie les hymnes pour chacune des fêtes nationales, dont il semble devenir le poète attitré et presque unique. Membre de la Convention, il est dévoué à la République, mais ne cèle pas ses sympathies pour les girondins proscrits. Son frère, pendant ce temps, est lancé à fond dans l’action contrerévolutionnaire. Lui-même est suspect de modérantisme. En septembre 1793, lors de l « épuration » des Comités, ;l cesse d’être membre de celui d’Instruction publique. Et déjà, le mois précédent, nous l'avons vu supplanté comme poète : à la fête du 10 août, dont David était l'organisateur, c'est un nommé Varon, rencontré ce jour-là pour la première et dernière fois, qui fut chargé d'écrire les vers de tous les hymnes, — et ils furent nombreux. Il reparaît pourtant, et, à la fin de 1793, reprend son rôle de poète national. IL faut l'avouer, d’ailleurs : il est toujours prêt à s'associer aux manifestations les plus diverses, et ses vers semblent aller à toute fin. On a vu servir les uns à la fête de révolte de Chäteauvieux, tandis que d’autres avaient été commandés pour les cérémonies les plus officielles. Maintenant, il écrit pour Gossec un Hymne à la Liberté, que des circonstances fortuites vont faire chanter à Notre-Dame pour la fête de la Raison; puis, tout à fait franchement cette fois, il compose un Hymne à la Raison, et celui-ci transformé à son tour, va, au bout de trois mois, grâce à unestrophe ajoutée, devenir une espèce d’'hymne à l’Être suprême. Car on est à présent tout à l'Être suprême; Chénier va donc composer encore l'hymne qui doit retentir harmonieusement à la fêteinstituée par Robespierre.