Les fêtes et les chants de la révolution française

142 FÊTES ET CHANTS DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.

Mais les temps sont devenus orageux. Lui-même est aux prises avec la tempête. Son Timoléon, en répétition au Théâtre-Français, est l’objet des notes les plus défavorables. « La représentation de cette tragédie, écrit Payan, produirait je pense les plus mauvais effets. nous ne verrions plus sur le théâtre que des rois honnêles gens et des républicains modérés. Belle leçon à présenter au peuple! » Et plus tard : « La tragédie de Timoléon peut devenir très dangereuse... L'auteur peut-il avoir mis dans sa pièce des sentiments révolutionnaires qui lui sont étrangers?» Le soir même, après le tumulte de la répétition générale, Chénier brûle son œuvre. Cela le 19 floréal, lendemain du jour où la Convention a voté la célébration prochaine de la fête à l'Étre suprême.

Et maintenant, c'est l’Hymne à l'Être suprême lui-même que Robespierre interdit.

Dépassons cette époque pour embrasser l’ensemble des événements. Deux jours après la fête, Robespierre fait voter la loi du 22 prairial, par laquelle Chénier se sent menacé. Il fuit de chez lui et va demander asile à ses amis de l’Institut de musique. Méhul met en musique son meilleur poème, le Chant du Départ : il croit prudent de ne pas le signer, et le laisse exécuter sans dire qu'il en est l’auteur. L'interdiction des vers de l'Hymne à l'Étre suprême subsiste : l’Institut national publie la musique de Gossec et la fait entendre publiquement; mais d’autres paroles ont été substituées à celles de Chénier.

Arrive enfin une dernière fête, celle qu'on avait projetée en l'honneur de Bara et Viala pour le10 thermidor, et qui n'eut pas lieu. On en connaît le programme, établi par David. Pas un vers de Chénier n'y figure. La proscription littéraire est complète.

Est-il nécessaire de rappeler qu’au moment même