Les fêtes et les chants de la révolution française

LA FÊTE DE L'ÊTRE SUPRÈME. 147

Cependant, malgré tant d'efforts, l'hymne à grand chœur dont les larges accords devaient harmonieusement résumer l’idée de la journée, cette page lyrique cause de tant de soucis, de tracas, d'inquiétudes et de

colères, ne fut pas chantée à la fête de l'Être suprème. Quoi que l’on fit, l’on n'avait pu être prêt à temps. Une correspondance administrative, conservée aux Archives nationales, nous donne là-dessus des assurances qui ne peuvent laisser aucun doute : il y est question du paiement des « frais de gravure, impression et copie de l'Hymne à l’'Être suprême par Chénier, copies faites sur la demande des citoyens Sarrette et Gossec, cel hymne n'ayant pas élé chanté »; l'autorité consultée làdessus répond qu'il faut payer « quoique l'hymne n'ait pas élé chanté, mais pour la seule raison que ces ouvrages ont été ordonnés pour la fête par l’Institut national ».

Ce fut donc, pour l'artiste, peine perdue : si, par la suite, quelques épaves purent être sauvées, jamais le grand Hymne à l'Étre suprême tel que Gossec le composa sur les vers de Marie-Joseph Chénier ne fut ni entendu, ni publié sous la forme intégrale dans laquelle il avait été conçu.

Heureusement, l’autre chant ne connut pas les mèmes tribulations. Malgré tous les obstacles qu’on pouvait redouter pour la réalisation d’un projet aussi extraordinaire que celui qui consistait à composer un hymne, l'enseigner au peuple, le lui faire exécuter, tout cela, dit-on, en l’espace de trois jours, l'Hymne à l'Être suprême à petit chœur, mis en musique par Gossec sur les vers de Desorgues : « Père de l'univers », eut les honneurs de la fête du 20 prairial, et y jouit d’une exécution comme l'histoire de la musique n'en vit jamais de semblable.

Je suis fort tenté de croire que la participation du